
Meta expérimente des chatbots proactifs sur WhatsApp et Instagram
Meta a discrètement lancé « Project Omni », un test interne qui pourrait transformer nos échanges sur WhatsApp et Instagram. Jusqu’à présent, les chatbots IA de la maison – créés grâce à la plateforme AI Studio – se contentaient de répondre à nos messages. L’ère de l’assistant numérique attentiste est révolue : bientôt, leurs interventions risquent d’être beaucoup plus « proactives »… et potentiellement intrusives.
Des messages non sollicités pour maintenir l’engagement
L’objectif affiché par Meta est simple : augmenter le taux d’interaction des utilisateurs avec les chatbots personnalisés, tout en renforçant la fidélité à ses applications. Concrètement, les bots issus d’AI Studio pourront, à l’avenir, initier une conversation sans attendre un prompt de la part de l’utilisateur. Ils pourront envoyer des rappels, des suggestions ou des relances basées sur l’historique des échanges, afin de « fournir une valeur ajoutée » et « maintenir l’utilisateur actif ».
AI Studio : la création de bots à portée de main
AI Studio, la plateforme no-code de Meta, propose une approche en trois étapes pour créer un assistant virtuel :
- Personnalité et ton : l’utilisateur choisit le style de son bot (formel, décontracté, thématique).
- Corpus de formation : on importe des articles, FAQ ou dialogues pour entraîner l’IA sur des sujets précis.
- Canaux de déploiement : le bot est lié à WhatsApp, Instagram ou Messenger pour interagir directement dans les apps.
Cette simplicité a déjà séduit de nombreuses marques, journalistes et influenceurs, séduits par la promesse d’une audience automatisée sans ligne de code.
Exemple concret : « The Maestro of Movie Magic »
Parmi les prototypes testés, un chatbot baptisé The Maestro of Movie Magic illustre bien le concept :
- Il commence par un message chaleureux, demandant si vous avez découvert de nouvelles bandes originales récemment.
- Quelques jours plus tard, s’il n’a pas eu de réponse, il envoie une relance : « Avez-vous exploré mes recommandations de la semaine ? »
- Il peut aussi proposer un mini-quizz interactif sur vos films préférés pour renforcer l’engagement.
Le tout sans que vous ayez sollicité le bot, sauf si vous avez entamé une première conversation.
Des garde-fous pour limiter l’intrusion
Meta n’ignore pas le risque d’exaspération. Plusieurs règles encadrent ces relances :
- Le bot peut seulement relancer si l’utilisateur a déjà interagi au moins une fois.
- Il n’insiste pas : si la première relance reste sans réponse, plus aucune tentative n’est effectuée.
- Les messages doivent rester cohérents avec la personnalité du chatbot et le contexte de la discussion précédente.
- Aucun contenu sensible ou controversé ne peut être abordé, sauf si l’utilisateur l’a initié.
Ces mesures visent à préserver le confort des utilisateurs et à éviter les dérives de « spam automatisé » tant redoutées dans le monde professionnel.
Un enjeu colossal pour Meta
Derrière cette innovation se cache un défi financier : Meta espère générer entre 2 et 3 milliards de dollars en 2025 grâce à ses produits d’intelligence artificielle générative. D’après les estimations internes, ce chiffre pourrait atteindre 1 400 milliards de dollars à l’horizon 2035, à condition que les utilisateurs continuent à revenir massivement vers ces outils.
Dans cet objectif, maintenir un taux élevé d’utilisation est primordial. Les notifications des chatbots, autrement dit des « messages de rappel », deviennent un levier efficace pour entretenir la relation avec l’utilisateur et le garder actif sur les plateformes.
Les premiers retours des testeurs
Selon Business Insider, les équipes chargées de Project Omni ont déjà recueilli des feedbacks. Les réactions sont mitigées :
- Certains testeurs apprécient de recevoir des suggestions utiles et personnalisées, comme un guide cinéma interactif ou des astuces en lien avec leurs centres d’intérêt.
- D’autres craignent une intrusion trop fréquente dans leur messagerie, au risque de se sentir harcelés par une IA constamment présente.
- Les marketeurs voient un potentiel énorme pour relancer des clients, mais déplorent la complexité de doser correctement la fréquence des messages.
Ces avis contrastés montrent que la frontière entre assistance et agacement reste très fine.
Vers un déploiement progressif
Pour l’instant, Project Omni demeure en phase expérimentale et réservé à un groupe restreint de créateurs de bots. Meta n’a pas encore fixé de date pour un déploiement massif. Plusieurs étapes restent à franchir :
- Finaliser les protocoles d’autorisation de relance et d’arrêt automatique des relances.
- Mettre en place des outils de monitoring pour éviter les abus et détecter les indicateurs de rejet des utilisateurs.
- Communiquer sur ces nouvelles pratiques pour sensibiliser les utilisateurs et obtenir leur consentement éclairé.
Le succès de cette initiative dépendra autant de l’équilibre trouvé entre utilité et respect de la vie privée que de l’adhésion des utilisateurs à ce modèle conversationnel inédit.